Vieillissement de la population, dépendance et pouvoirs publics : quelles solutions pour assurer une vie digne aux personnes âgées ?
Alors que la création d’une nouvelle branche de la Sécurité Sociale, consacrée aux enjeux de dépendance, a été votée pour 2021, la Drees anticipe que d’ici 2030, près de 108 000 places supplémentaires devront être ouvertes en Ehpad afin d’accueillir une population croissante de seniors en perte d’autonomie. L’occasion de mieux cerner l’état actuel de la dépendance et les nombreuses questions à venir.
12 févr. 2021
Dans sa récente étude sur la perte d’autonomie en France, la Direction de la Recherche, des Études, de l’Évaluation et des Statistiques (DREES) présente ses dernières projections pour 2015-2050 sur l’évolution démographique des seniors, de la dépendance, des bénéficiaires de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et des besoins en termes de lieux de vie. Les projections varient en fonction des hypothèses pessimiste, intermédiaire ou optimiste (dépendantes de l’état de santé de la population âgée) retenues sur ces variables. Il apparaît qu’en 2030, la France comptera 21 millions de seniors âgés de plus de 60 ans, soit 3 millions de plus qu’en 2019. De telles projections démographiques impliqueraient que les Ehpad puissent accueillir 108 000 personnes supplémentaires à pratiques actuelles d’entrée en institution inchangées. Avec des projections démographiques similaires, le rapport Libault de 2019, portant sur la concertation Grand âge et autonomie, évaluait les dépenses supplémentaires relatives à la dépendance à hauteur de 9,2 Mds€ en 2030.
Un tel niveau de tension interroge nécessairement sur la prise en compte de la dépendance par nos institutions. Actuellement, la perte d’autonomie s’évalue par l’appartenance à un des six GIR (groupe iso-ressources), le GIR 1 correspondant au plus haut niveau de perte d’autonomie avec altération grave des capacités physiques et mentales, et nécessitant la présence continue d’intervenants. Cette classification peut donner droit à des aides de l’État : ainsi, les personnes en GIR 1 à 4 ont la possibilité de bénéficier d’une allocation personnalisée d’autonomie (APA) afin de permettre à l’individu de rester à son domicile (portage de repas, aide à domicile, etc.). L’APA peut également financer une partie de l’hébergement en Ehpad.
Pour répondre à cet enjeu démographique et financier, le Parlement a voté la création d’une cinquième branche de la Sécurité Sociale dédiée à l’autonomie. Il s’agira notamment de financer la perte d’autonomie, reconnue comme un « nouveau risque social » et « assuré par la nation à chacun »1. Le rapport de septembre 2020 conduit par l’inspecteur général des finances Laurent Vachey évoque les principales sources de financement possibles pour cette branche, parmi lesquelles des transferts d’autres branches, des réductions de niches sociales et fiscales, des financements privés ou encore d’éventuels prélèvements obligatoires. Une ministre déléguée dédiée aux questions d’autonomie a également été nommée. Brigitte Bourguignon a ainsi pris en charge, entre autres, les enjeux de renforcement de l’attractivité des métiers du grand âge.
La question de la dépendance se pose au sein de toutes les économies dans lesquelles un vieillissement de la population est observé : entre 2015 et 2060, l’OCDE anticipe un doublement de la population âgée de plus de 65 ans2 dans les pays du G20. Au niveau européen, la réflexion avance aussi avec la publication par la Commission d’un livre vert sur le vieillissement, ouvrant une période de consultation publique de 12 semaines3. Outre les questions de placement dans des lieux de vie ou de maintien à domicile, sont aussi à prendre en compte les considérations relatives au bien-vieillir et à la fin de vie.