Les épargnants et l’ISR : nouveaux enseignements
À l’heure de la généralisation des approches dites de « durabilité » des investisseurs, les acteurs historiques de l’investissement socialement responsable (ISR) s’interrogent sur les enjeux de méthode et le niveau d’exigence de leurs démarches. Pour prendre un peu de recul, il peut être intéressant de s’inspirer plus directement du point de vue des épargnants. Celui-ci n’est d’ailleurs pas toujours celui qu’on croit !
9 juin 2022
Très souvent, ces dernières années, une forme de dissonance était mise en avant entre la prise de conscience des enjeux sociaux et environnementaux par les citoyens et le comportement des mêmes en tant qu’épargnants. Pire, si les objectifs de contribution de l’ISR à une économie plus écologique et plus solidaire rencontraient l’intérêt, le doute était censé persister sur sa rentabilité et décourager les bonnes volontés : à quoi doit-on renoncer financièrement quand on fait le choix de placements socialement responsables ? Et tous les convaincus de l’ISR de mettre en avant l’ensemble des études montrant que la prise en compte de critères sociaux et environnementaux dans les investissements n’induisait pas une moindre performance financière, voire faisait bénéficier d’un biais défensif en cas de turbulences de marché. Ceci s’est d’ailleurs de nouveau vérifié lors de la crise économique et financière de 2020.
Ces démonstrations parfois laborieuses sont intéressantes, mais elles ont elles aussi un caractère défensif. Elles s’adressent à un épargnant « idéal », ou du moins théorique, qui, parce qu’il est averti sur les aspects financiers, à la recherche de rendement, serait méfiant sur les aspects extra-financiers. Or, s’il y a une méfiance des épargnants vis-à-vis de l’ISR, elle porte plutôt sur sa crédibilité face aux nouveaux enjeux sociétaux, climatiques, aux révélations sur les pratiques dommageables à la collectivité de certaines entreprises voire de secteurs d’activité donnés. C’est tout l’objet de la lutte contre le galvaudage de la responsabilité sociale des investisseurs, qui est un risque significatif aujourd’hui et amène les acteurs les plus exigeants à réinterroger leur démarche.
À rebours des réflexes traditionnels, il apparaît dans une enquête menée récemment pour le compte de Préfon auprès d’un millier de répondants que, plus les épargnants ont de connaissances financières, surtout croisée avec une bonne connaissance de l’ISR, plus ils sont enclins à orienter leur épargne vers des placements socialement responsables. Pour battre en brèche une autre idée reçue, les épargnants aux plus forts revenus se placent de plus en plus dans les catégories où l’intérêt pour l’ISR croît. Même les épargnants à fort patrimoine professant ne pas s’intéresser à l’ISR s’attendent à une évolution des pratiques et souhaitent que leurs placements ne soient pas orientés vers les énergies fossiles. Et l’absence de tout bilan environnemental et social est considérée par l’ensemble des catégories comme inacceptable.
Pour un acteur comme Préfon, pour lequel les enjeux sociaux sont cruciaux y compris pour réaliser une transition énergétique et écologique ordonnée, il est encourageant d’observer que ceux-ci sont très largement mis en avant par les épargnants, notamment le respect des droits de l’Homme par les entreprises et les États. Il semble à cet égard que les catégories d’épargnants indifférents à la prise en compte de critères sociaux et environnementaux dans les investissements se réduisent drastiquement. Pour ceux qui ne détiennent pas encore de placements ISR, la labellisation apparaît comme un argument décisif ; pour les années à venir, ils visent d’atteindre la part moyenne de placements ISR déjà détenue pour l’ensemble des catégories d’épargnants. L’étape suivante sera de rejoindre le niveau de détention des investisseurs individuels les plus avertis qui ont déjà fait le choix de l’ISR !