Daniel Keller, président de l’Association des anciens élèves de l’ENA (AAEENA) : « Faire de l’égalité des chances une priorité de notre action »
Préfon est partenaire de l’opération « Egalité des chances » initiée et menée par l’AAEENA dans plusieurs lycées de quartiers sensibles de la banlieue parisienne et en région Provence-Alpes-Côte d’Azur. Daniel Keller, président de l’AAEENA, a fait de cette opération une priorité, une affaire de volonté et de solidarité.
9 juin 2022
En octobre 2020, l’Association des anciens élèves de l’ENA (AAEENA) a lancé une opération baptisée « Egalité des chances » dans plusieurs lycées situés dans des quartiers prioritaires de la banlieue parisienne. Elle a depuis réitéré cette action dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA). Quelles sont les raisons de cet engagement ?
L’AAEENA a décidé de renforcer son engagement au service de missions d’intérêt général en plusieurs étapes : partenariat avec des associations de terrain (Des Territoires aux Grandes Ecoles, Réussir aujourd’hui notamment), conventionnement avec le ministère de la Transformation et de la Fonction publique pour appuyer le dispositif des « prépa Talents » mises en place pour diversifier les recrutements ; enfin, décision d’intervenir dans les lycées pour sensibiliser les élèves aux métiers de la Fonction publique.
En quoi consiste plus particulièrement cette opération et quels en sont les enjeux ?
Cette opération a consisté à présenter les métiers de la fonction publique à des lycéens à l’écart des chemins de l’excellence, qu’il s’agisse de lycées en ZEP (Saint Denis, Trappes, Marseille) ou sur des territoires ruraux (Alpes de haute Provence, Hautes Alpes). Nous avons constaté une grande méconnaissance des opportunités offertes par les métiers de la fonction publique et un intérêt spontané pour ces filières. Les questions ont beaucoup porté sur les formations à suivre pour passer ce type de concours et les choix d’orientation à faire. Mais également sur le contenu de ces métiers perçus de manière très abstraite.
Comment intervenez-vous auprès des lycéens ?
Nous sommes intervenus devant des groupes d’élèves, entre 25 et 60 selon les cas, en présence du proviseur et des enseignants. J’avais constitué des panels de jeunes énarques qui présentaient leur parcours dans un souci de démystifier leur réussite, la plupart rappelant qu’ils étaient des produits de la méritocratie. Il était utile de présenter les hauts fonctionnaires comme des personnes ressemblant à tout le monde.
Quels constats tirez-vous de ces rencontres ?
Je pense que nous avons activé des liens appréciés, montrant que les énarques ne sont pas des personnes hors sol. L’expérience fut intéressante pour les énarques eux-mêmes appelés à donner de leur temps. Ce n’est pas négligeable. Nous avons également manifesté de l’attention envers des jeunes qui s’estiment trop souvent invisibilisés. Au fond, le principal écueil me semble être leur sentiment d’isolement, comme s’ils vivaient dans des « ghettos », j’utilise ce terme avec toute la prudence qui convient et loin de moi l’idée de faire un quelconque amalgame. En tous cas, il est essentiel d’abattre les murs invisibles qui les séparent du reste de la société.
Vous dites que l’égalité des chances doit être une réalité, qu’il faut montrer à ces lycéens qu’ils peuvent, eux aussi, accéder aux métiers de la fonction publique. Quelle suite entendez-vous donner aux lycéens désireux d’embrasser une carrière dans la fonction publique ?
Nous avons proposé aux lycéens rencontrés de rester à leur disposition, en suggérant à chacun d’entre eux qui le souhaiterait qu’un mentor demeure à son écoute pour l’accompagner dans ses orientations, voire ses études. Nous verrons si cette démarche prend. C’est lorsque l’on pourra capitaliser sur quelques réussites que l’on pourra considérer que la partie est bien engagée. Je redoute de la part de ces jeunes une forme de fatalisme qui les conduirait à ne pas saisir leur chance. En tous cas, nous allons poursuivre cette démarche, de mieux en mieux appréciée au fil des ans par nos camarades.